Louphole

La main

Étrange main de puissance et de sens,
Elle et sa jumelle sans cesse se lient
De leurs doigts tels dix tentacules qui dansent,
Membres informes détenteurs de génie.

Fin créateur, forge de l'origine,
Elle modèle ses forces, invente et construit,
Démiurge de la volonté divine
À l'imagination qui démolit.

Habile artiste, maîtresse des instruments,
Elle transcende le temps, sculpte, compose et joue,
Sans égal, ni d'aisance, ni de talent,
Ses œuvres inspirées par la voix d'un fou.

Muette conteuse, traductrice des instincts,
Elle parle par gestes, partage par contact,
Discours d'un langage sans tous ces mots vains,
Liant les paroles aux symboles de l'acte.

Docile esclave, arme de paix et de sang,
Elle se blesse et souffre, libre dans ses choix,
Lunatique en guerre avec un drapeau blanc,
Obéissante, bien et mal à la fois.

Etudes de mains, Baccio - Photo (C) RMN-Grand Palais / Jacques Quecq d'Henripret

Agile actrice du théâtre de la fête,
Elle se met en scène, célébrant la vie,
Contrainte par les fils telle une marionnette,
À suivre l'empreinte d'une ligne définie.

Curieuse chercheuse de tactiles découvertes,
Elle touche et entoure, apprend à connaître
De ce qui se cache, prêtresse interprète
De caresses faites d'oracles à transmettre.

Douce amoureuse d'un sensuel désir,
Elle charme et torture de passions violentes,
Organe de douleur et de tout plaisir,
Par l'orgasme de l'amant qu'elle tourmente.

Fragile reine qui demande protection,
Elle tient l'autre et s'offre, comme par dépendance,
Dépassant ses peurs d'un tel abandon,
Adoration réciproque de confiance.

Unique mélange de personnalité,
Elle se décompose et se contredit,
Différentes facettes d'un être singulier
Atteint finalement de schizophrénie.